• Jean Prieur collaborateur de la revue "La revue de l'au-delà"

    Jean Prieur collaborateur de la revue "La revue de l'au-delà"

    Il est l'auteur connu et apprécié d'une trentaine d'ouvrages consacrés à l'ésotérisme et à  l'histoire de la  spiritualité qu'il a fait découvrir à de nombreux contemporains.
    Il a beaucoup fait pour faire connaître les messages de Roland de Jouvenel.
    Il a donné aussi de nombreuses conférences, tant en France qu'à l'étranger.

    Ouvrages :

    Chez d'autres éditeurs
    Du monde des esprits au monde de l'Esprit,
    Muhammad, prophète d'Orient et d'Occident
    Allan Kardec et son époque
    Le pays d'après
    Les mondes subtils et la résurrection immédiate 
    Les maîtres de la pensée positive
    Toi, le seul vrai Dieu, brève histoire du monothéisme
    La nuit devient lumière : que dire à ceux qui ont perdu un être aimé
    L'âme des animaux
    La prémonition et notre destin 
    Le mystère des retours éternels, réincarnation, un problème ouvert
    Zarathoustra, homme de lumière
    Le surnaturel à travers l'histoire 
    Gabriel Marcel , philosophe d el'espérance (en collab. avec Jean Guitton, Maurice Becqué et Roger Troisfontaines)
    Le livre des morts occidentaux
    Les témoins de l'invisible - Éditions Lanore
    Cet Au-delà qui nous attend - Éditions Lanore
    Les «morts» ont donné signe de vie - Éditions Lanore
    Les visiteurs de l'autre monde - Éditions Lanore
    L'apocalypse - Éditions Lanore
    Révélations sur la vie future - Éditions Lanore
    Les tablettes d'or, autour de Roland Jouvenel et de ses messages - Éditions Lanore
    Navires pour l'Atlantide, récit initiatique - Éditions Lanore
    Les symboles universels - Éditions Lanore
    Les visions de Swedenborg - Éditions Lanore
    La mémoire des choses - Éditions Lanore
    Swedenborg, biographie et anthologie - Éditions Lanore                                                           Jean Prieur en 1937
    Murat et Caroline - Éditions Lanore
    Alexandre le Grand et les mystères d'Orient - Éditions Lanore
    L'Europe desmédiums et des initiés - Éditions Lanore
    Les sourires du monde parallèle -, l'Au-delà et l'humour - Éditions Lanore

    Entretien

    (Revue de l'au-delà n° 16 - juillet-août 1998)

     Jean Prieur est bien connu de nos lecteurs par les multiples ouvrages qu’il a consacrés à l’ésotérisme et à la spiritualité qui ont aidé tant de personnes sur leur chemin personnel. Il est, on le sait, celui grâce à qui nous pouvons lire les messages de Roland de Jouvenel. Il est aussi celui qui a été l’ami fidèle de Jeanne Morrannier dont il a préfacé le troisième livre de messages «La mort est un réveil».

     Jean Prieur vient de publier un nouvel ouvrage «Toi le seul vrai Dieu», dont nous avons donné des extraits dans cette revue.Ce livre comme vous le découvrirez au cours de cet entretien est le fruit d’une longue maturation à l’origine de laquelle se trouve une véritable révolte, une incompréhension de ce Dieu amour, comme il arrive parfois après ce que l’on appelle des coups du destin, des épreuves difficiles à surmonter.

     Cette «brève histoire du monothéisme» qui fait l’objet essentiel de cet entretien nous rend plus proches de tous ceux qui à travers les temps pouvaient prier en disant «Toi, le seul vrai Dieu», comme Jésus le disait dans «la prière sacerdotale», tous ceux qui nous sont apparentés par la pensée mais que nous connaissons souvent encore si mal.



    La Revue :
    La mort d’un être peut parfois causer un véritable traumatisme métaphysique, comme ce fut le cas pour Jeanne Morrannier après le décès de son fils. Vous avez vécu un tel drame, après la mort d’une jeune fille...


    Jean Prieur : Il est vrai que j’ai ressenti moi aussi cette fureur et même cette révolte contre le Ciel que je trouvais injuste et cruel. Je n’arrivais pas à me résigner. Ce deuil survint en 1952 et c’est seulement lorsque jMarcelle et Roland De Jouvenel’ai fait la connaissance de Marcelle de Jouvenel, qu’elle m’a parlé de ses messages et me les a fait lire, que tout a changé pour moi. J’ai vécu comme une révolution intérieure mettant fin à onze ans de colère et d’éloignement des choses de l’Esprit...


    Était-ce un éloignement... profond?

    Oh non. Je n’ai jamais été athée. Je ne doutais pas de l’existence de Dieu, mais de son amour. Cette jeune fille avait eu, en effet, un destin particulièrement dur: elle était atteinte de tuberculose et, à cette époque, on en mourait encore. Sa jeunesse fut extrêmement triste. Elle allait de sanatorium en sanatorium, espérant toujours la guérison. Au moment où elle croyait être rétablie, puisqu’elle avait même repris ses occupations professionnelles, son état s’est brutalement aggravé et elle a eu une agonie extrêmement pénible. J’ai été très choqué par cette mort, surtout lorsque j’ai su combien ses derniers jours avaient été douloureux. Si elle s’était éteinte doucement, je pense que son départ m’aurait été moins pénible à porter.


    Cinq ans après son décès, au cours d’un voyage en Grèce, vous avez vécu un moment important de votre vie intérieure...

     Et que j’ai compris longtemps après... À ce moment-là, c’est assez curieux, j’étais heureux. Je réalisais un rêve que j’avais formé depuis longtemps: être en Grèce. Tout concourait à me laisser de cette journée un souvenir parfait : un temps splendide, la beauté ambiante et moi dans l’excellente forme de la maturité.

     J’avais envie que les choses spirituelles me deviennent plus accessibles, plus concrètes. Et c’est là que je me suis écrié dans un élan spontané : « Sois! Sois Existe, existe donc ! » Et j’ai entendu nettement au niveau du plexus une voix qui disait nettement : « Il n’existe pas d’autre Dieu que Dieu. » Dans l’immédiat, j’ai été déçu, la réponse n’étant pas celle que j’attendais.

     De nombreuses années ont passé... Ces mots ont fait en moi leur chemin m’amenant finalement à écrire cette brève histoire du monothéisme que j’ai intitulée : «Toi, le seul vrai Dieu».


    Fruit d’une longue réflexion, comme vous venez de le dire, votre livre n’est-il pas comme un cri du cœur?

     Oui... «Toi, le seul vrai Dieu», ces mots ont été prononcés par Jésus dans «la prière sacerdotale» ainsi que le rapporte Jean dans son évangile (Jean 17, 3).
    Toi, le seul vrai Dieu
     On m’avait donné une sorte de thème qu’il me faudrait par la suite travailler : Toi, tu es le seul vrai Dieu, donc... C’est un constat qui amène à écarter ces nombreuses difficultés de la foi, que le christianisme a accumulées. Cette question restant toutefois un sujet sensible, j’évite d’en discuter pour ne pas choquer certains de mes interlocuteurs car ces échanges font jaillir des sentiments négatifs dont je voudrais m’abstenir.

     Depuis que j’ai pris conscience de cette vérité, tout est devenu beaucoup plus simple pour moi, même dans la vie quotidienne. Et je peux dire que je suis plus heureux aujourd’hui que lorsque j’étais plus jeune.

     La révélation des messages christiques en 1963, a été importante, car j’ai compris que le spirituel n’était pas toujours du domaine de l’impalpable, de l’invisible, de l’intangible et qu’il existait une réalité concrète en dehors du mystère et de la religion. J’aime bien comprendre, et ressentir.

     C’est à ce moment que peut intervenir la paix intérieure, cette paix qu’il faut rechercher à tout prix - avec en prime le bonheur!


    Les messages de Roland de Jouvenel répondaient finalement à une attente en vous?

     Sans doute, et puis son expression poétique trouve en moi une certaine tonalité qui fait que je m’y sens parfaitement à l’aise. C’est même le messager avec lequel je me sens le plus en affinité.                         Au diapason du ciel, messages de Roland de Jouvenel

     Ceci est d’ailleurs admirable chaque messager a sa personnalité: Georges est un homme de sciences, Pierre Monnier est un théologien avec lequel je ne suis pas toujours d’accord parce que je trouve en lui des survivances du vieux christianisme. Avec Roland, c’est vrai, je suis vraiment de plain pied. Comme je l’étais d’ailleurs avec Marcelle, sa mère, ou Jeanne Morrannier.



    En fait, vous avez eu la chance de bien connaître l’une et l’autre ?

     Oui et je dois dire que toutes les deux avaient ce point commun d’être des femmes joyeuses et optimistes. Pour moi, c’est un signe qu’elles étaient dans la bonne voie.

     Elles avaient d’autres ressemblances. Petites, sveltes, toujours joliment habillées, elles avaient, l’une et l’autre, beaucoup de charme allié à une vive intelligence. Elles avaient le sens de la notation juste, de l’observation drôle, parfois même assez critique, et montraient de l’humour dans tous leurs propos. J’ajouterai qu’elles étaient toutes les deux Normandes et que le mysticisme entre Cherbourg (Jeanne) et Rouen (Marcelle) a quelque chose de très spécial. Il diffère totalement du sombre mysticisme espagnol. Ii reste très proche des réalités et, je le répète, est vécu dans la joie.


    Après cette incursion sympathique du côté des messagers, revenons à votre livre. Vous évoquez, bien sûr, le passage fulgurant d’Akhenaton. Mais, en fait, le monothéisme égyptien est bien plus ancien, puisqu’il remonte, rappelez-vous, à plus de 5 000 ans par rapport à nous.

     Exactement. À force de nous rebattre les oreilles aujourd’hui avec le troisième millénaire, j’ai voulu rechercher ce qui se passait 3 000 ans avant Jésus-Christ. Je me suis retrouvé devant la pyramide de Sakkara, avec le roi Joser. Ce dernier qui savait tout ce qu’on pouvait savoir de son temps, il était monothéiste. Je suis parti de la sagesse d’lmhotep qui m’a conduit vers celle d’autres grands personnages. J’ai été vraiment étonné de leur pureté morale, de leur profondeur et de leur humanité, qualités que l’on ne rencontre pas toujours dans la Bible.

     On trouve donc là une chaîne ininterrompue qui va du vieil lmhotep jusqu’au prêtre Pétosi ris, dont je cite quelques textes, et à Hermès Trismégiste qui vécut un peu avant l’ère chrétienne et dont les écrits sont tout à fait sublimes. C’est à la fois très beau, très profond. Le Trismégiste a beaucoup à nous apprendre. (Nous avons cité dans cette revue (n°13), les principes d’Hermès Trismégiste qui sont toujours applicables sur le plan moral et aussi sur le plan scientifique avec notamment le principe de polarité.


    Le monothéisme juif n’était donc pas, comme on le croit souvent, isolé en son temps.

     Dans l’Antiquité, existait un courant monothéiste plutôt réservé à l’élite et un courant polythéiste qui convenait au peuple. Mais pour quelqu’un qui regarderait le catholicisme de l’extérieur n’aurait-il pas envie de Jean Prieur dire qu’il existe encore aujourd’hui la même dualité? Je pense à l’Amérique du sud, aux Philippines où des hommes se font crucifier, aux processions avec les pénitents encagoulés... Pour moi qui n’ai pas été élevé dans le catholicisme, tout cela semble extravagant et folklorique.

     Personnellement, je ne suis pas du tout inquiet pour l’avenir de l’Église catholique, elle subsistera bon pied bon oeil avec toutes ces manifestations de masse auxquelles le tourisme vient apporter son renfort.


    Vous voulez dire que parfois la forme tend à prendre le pas sur le fond?

     On constate, qu’il existe une sorte de règle dans les religions : ne survivent, à travers les temps, que les rites, et principalement les rites alimentaires. Je connais personnellement des musulmans qui n’ont jamais lu le Coran, qui ne font jamais la prière et ne respectent pas les Cinq piliers de l’islam, mais qui observent le Ramadan et surtout sa liesse nocturne. Chez les chrétiens on retrouve la même chose avec les oeufs de Pâques et surtout les réveillons de Noël! Il en va de même chez les Juifs où les interdits alimentaires sont comme on le sait particulièrement stricts.


    Votre remarque paraît pertinente, et même décapante, mais n’est pas très encourageante...

     Il n’est pas très enthousiasmant non plus d’étudier l’Histoire, et particulièrement l’Histoire comparée des religions, et il est bien difficile de ne pas douter. Mais, si on se cramponne à cette vérité: «Il n’y a pas d’autre Dieu que Dieu», tout le reste devient superfétatoire.


    Cette recherche sur l’Égypte ancienne semble vous avoir beaucoup stimulé...

     Je trouve très beau dans la religion égyptienne la confession négative que l’on découvre sur les stèles funéraires : «Je n’ai pas fait travailler au-delà de la tâche», «Je n’ai pas faussé les poids», et surtout, ce qui est à la fois très beau et très court : «Je n’ai pas fait pleurer». C’est d’une haute portée morale. Émouvantes aussi, ces déclarations que l’on retrouve avec une grande similitude dans la l’Évangile: «J’ai vêtu ceux qui étaient nus», «J’ai donné à manger à ceux qui avaient faim et soif». Certains textes égyptiens se retrouvent d’ailleurs mot pour mot dans «Le livre biblique des Proverbes» ainsi que dans les Psaumes.


    La Bible doit beaucoup à l’Egypte, mais on ne le sait pas depuis très longtemps.

     Sans Champollion qui est pour moi un grand personnage de l’Histoire, on aurait ignoré à tout jamais ces textes et l’on se serait figuré que la vraie spiritualité commence avec le christianisme.


    La proximité géographique des peuples en question explique assez bien ces échanges, ces emprunts...

     D’autant plus que l’on s’imagine que les voyages datent du XXe siècle... Dans l’Antiquité, les gens voyageaient déjà beaucoup et en profondeur parce que comme les moyens de déplacements étaient lents la moindre excursion pouvait durer plusieurs années. Ils avaient donc le temps de se pénétrer de la culture des pays traversés. Alors que le touriste moderne est comme dans une sorte de bulle et ne voit que du superficiel.


    L’esclavage, issu des guerres, facilitait aussi les transmissions de cultures et de croyances. En outre, dans le proche Orient existait surtout le système des caravanes...

     On le constate dans la biographie de Mahomet qui se rend jusqu’à Damas, qui traverse donc la Syrie et qui apprend ainsi beaucoup - Mahomet avait d’ailleurs un esclave chrétien lequel a pu lui apporter également des renseignements intéressants sur le message du Christ.                                                                           
     On circulait beaucoup dans ces temps lointains où il faut noter que les frontières n’étaient pas toujours bien précises, et se traversaient facilement. Certaines caravanes allaient de la Méditerranée jusqu’à la Chine, empruntant ce que l’on appelait la «route de la soie». Qui a été empruntée aussi par Marco Polo. Échanges commerciaux cela va sans dire, mais aussi échanges de connaissances.


    On s’aperçoit en lisant votre ouvrage, combien nous avons des jugements erronés sur les pratiques religieuses des peuples anciens. Par exemple, les zoroastriens ont été vite catalogués comme, adorateurs du feu ou du soleil...

     Ceux qui vénéraient le soleil avaient compris le principe de l’unité puisque le soleil est seul dans sa gloire.Jean Prieur en conférence C’est cette idée qui l’emportait. Le soleil représentait aussi le symbole de la vie universelle que l’on retrouve exprimé jusque dans la Bible où Dieu est appelé «Soleil de justice» : « Pour vous se lèvera le Soleil de justice et la guérison sera sous ses ailes, lit-on à la fin de l’Ancien Testament. Là, on a même le symbole du soleil ailé.



    Dans l’Antiquité on recourait peu au langage abstrait on lui préférait les symboles...

     Aussi parler des Zoroastriens comme des adorateurs du feu est inexact et vexatoire pour eux qui se déclaraient, se déclarent toujours, adorateurs, d’Ahura Mazda, le Seigneur de sagesse, et de lumière. Il ne faut pas confondre le symbole et l’être qu’il représente. D’ailleurs, si dans la Bible Dieu se définit comme « Je suis celui qui suis », chez les Zoroastriens Ahura Mazda emploie une formule identique: « Je suis ce que je suis » Ahmi Yad Ahmi.

     Il existe donc en tout temps, en tous liens un grand courant monothéiste.. C’est comme un fil d’or qui passerait à travers le tissu de toutes les religions, le long fil d’or de la tradition universelle.



    Et Jésus?

     Jésus est venu s’inscrire dans ce grand courant, il commence par dire : Le Seigneur notre Dieu est l’unique Seigneur. Mon idée dans ce livre est qu’il y a deux périodes dans le christianisme : les deux premiers siècles où l’esprit du Christ est toujours vivant et agissant puis se succèdent les conciles où interviennent les empereurs byzantins.

     On peut dire que Rome est innocente de ces excès puisque dans tous ces conciles les évêques occidentaux étaient en toute petite minorité. Quelques fois ils n’étaient même pas représentés et c’étaient les évêques alexandrins, et byzantins qui, appuyés par l’empereur, décidaient de toute chose. Il faut préciser en effet que les maîtres de Constantinople étaient tous férus de théologie!



    Qu’en était-il des rapports de Mahomet et des Chrétiens?

     En étudiant sa vie, on ne peut qu’être frappé de l’importance que le christianisme représentait pour lui. D’abord à travers ce sage arabe Waraqa ben Naufal, qui s’était converti tout seul au christianisme et connaissait très bien les Écritures. Il était le cousin de Khadidja, l’épouse de Mahomet.

     L’Arabie du temps de Mahomet, se caractérisait aussi par une fermentation spirituelle très grande. Certaines tribus étaient entièrement chrétiennes, notamment au Nord de l’Arabie, en Éthiopie, au Yémen appelé l’Arabie heureuse. Et puis, il y avait aussi les Juifs qui s’étaient dispersés après les deux destructions de Jérusalem - Titus en 70 et Hadrien en 136 La diaspora avait répandu le judaïsme dans toute cette région. Il ne restait que des Arabes polythéistes que Mahomet s’est chargé de convertir.

     Il existait donc de fortes communautés juives et chrétiennes auxquelles Mahomet s’est adressé successivement. Les premières lui ont répondu qu’un prophète ne pouvait être que Juif et non Arabe. Il s’est tourné vers les chrétiens, avec lesquels il avait davantage d’affinités, puisque deux moines nestoriens avaient vu en lui le futur prophète. Il faut ajouter qu’il était lui même très admiratif de la personnalité de Jésus et aussi de Marie dont il est fait référence souvent dans le Coran. Il n’a pas eu plus de succès avec les chrétiens. C’est regrettable parce que l’on aurait pu envisager une grande religion, alors monothéiste qui aurait évité toutes ces guerres et leurs séquelles. A ce moment-là, on pouvait, encore faire l’unité.


    On aurait pu croire que le polythéisme était beaucoup plus répandu que les religions abrahamiques!

    Il existait bel et bien. À la Mecque, la Kaaba, la pierre noire -une météorite - était vénérée avec 360 petites divinités par les Arabes païens. C’est ce qui explique que, lorsqu’il a commencé à prêcher, Mahomet a été obligé de quitter La Mecque, sa vie étant en danger, pour se réfugier à Médine. Les juifs et les chrétiens qui y vivaient très nombreux l’ont bien reçu, mais pas toutefois au point d’envisager quelque fusion. C’est des années plus tard qu’il a repris La Mecque manu militari, car c’était un guerrier, et il a détruit toutes les idoles. C’était d’autant plus un scandale pour les habitants de la ville qu’il appartenait à la tribu des Koraïshites chargée justement de l’entretien de la Kaaba païenne et de l’accueil des pèlerins polythéistes.



    Comment expliquez vous la rapidité avec laquelle l’islam s’est répandu sur toutes les anciennes terres chrétiennes et zoroastriennes?

     En ce qui concerne ces dernières, il faut savoir que le message de Zarathoustra avait été obscurci par les mages et que ceux-ci, devenus très intolérants, persécutaient les chrétiens, les juifs, les brahmanes et les hindouistes. Les Arabes ont été évidemment bien accueillis à leur arrivée en Perse, mais aussi en Inde où ils ont supprimé le système des castes.

     Pour les pays chrétiens, il faut noter deux raisons importantes. La première, matérielle, concernait les impôts dont Byzance les écrasait. La seconde ressortait au fait qu’ils étaient considérés comme des hérétiques. C’était l’époque où l’on se déchirait entre monophysites et nestoriens. Il faut dire aussi que les Coptes et les Syriens n’avaient pas accepté les dernières décisions des conciles, et notamment celles de Chalcédoine. On était déjà au bord de la rupture. Aussi, quand les Arabes sont arrivés à Alexandrie, ont-ils été acclamés. À Jérusalem, la prise de la ville par Omar n’a pas été suivie d’ un bain de sang comme ce fut le cas avec les Croisés. L’islam a autorisé les différentes religions qui se sont éteintes d'elles-mêmes, puisqu’il a eu l’habileté de leur imposer une taxe spéciale, une capitation. Et les hommes étant ce qu’ils sont... beaucoup se sont convertis simplement pour échapper à l’impôt.

     Tout cela s’est passé en 100 ans. Le prophète est mort en 632 et en 732 les Arabes étaient à Poitiers! La providence veillait-elle ? je le crois car une révolte opportune des Berbères freina leur élan!

     Tous les historiens sont frappés par la rapidité avec laquelle cette religion s’est répandue. Toutes ces terres sur lesquelles le christianisme était né sont devenues musulmanes...


    Votre réflexion sur le monothéisme ne se situe-t-elle pas dans la perspective de la religion universelle dont parle Georges Morrannier?

    Jean PrieurSeul le monothéisme pur peut conduire en effet à une religion universelle. Mais si l’on arrivait à une unification des monothéismes, ce serait déjà beaucoup. Ce n’est pas encore pour tout de suite, car le renouveau religieux s’accompagne d’un durcissement de l’intégrisme et du fondamentalisme.


    L’évolution actuelle vous paraît-elle quand même aller dans la bonne direction?

    Au milieu de ce siècle, Sartre disait « Dieu, l’âme et l’immortalité sont des illusions définitivement dissipées.» On peut dire, aujourd’hui, qu’il s’est trompé du tout au tout, car ces notions se portent mieux que jamais. Il existe de tous les côtés, une grande effervescence spirituelle tout à fait inattendue. On constate un retour en force des valeurs mystiques alors que les progrès de la science faisaient augurer à certains que la notion de Dieu serait définitivement balayée. Aujourd’hui, il existe, avec bien des variantes, une immense aspiration vers Dieu.

    SOURCE : larevuedelaudela.com

    « Entretien de Jean Prieur par Olivier Germain-ThomasJacques CHANCEL s'entretient avec Jean PRIEUR »
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