• Extrait du livre : Les morts qui ont donné signes de vie

    Extrait du livre

    Les morts ont donné signes de vie

    de Jean Prieur


    Comme c'est beau, ce que je vois !

    De même qu'il y a des chrétiens qui vivent et agissent comme si Dieu n'existait pas, il y a des athées qui vivent et agissent comme si Dieu existait: tel était le cas du commandant Jonzac. Cet homme, d'une absolue droiture, démentait à lui seul l'affirmation de Rousseau: << J'ai longtemps cru qu'on pouvait avoir de la probité sans religion, maintenant je ne le crois plus. >>

    L'athéisme de M. Jonzac n'était pas à base de matérialisme, mais au contraire de l'idéalisme le plus exigeant. Il tenait ce raisonnement qu'on entend souvent dans la bouche des hommes de sa trempe: « Si Dieu existait, on ne verrait pas dans le monde ces scandales, ces atrocités, ces injustices monstrueuses. >>

    Déclaration qui est encore un hommage indirect à l'Être suprême que l'on ne peut imaginer autrement que parfait. Déclaration qui prouve au moins que l'on souffre de la souffrance d'autrui, alors que tant de croyants s'en accommodent fort bien. Déclaration infiniment respectable et qu'il n'est pas si facile de réfuter.
    Si j'avais connu le commandant, je lui aurais dit ceci:

    << Le maître de la Terre, ce n'est pas Dieu, c'est l'homme. Or, le second s'est laissé depuis longtemps embobiner par ce troisième larron que le Nouveau Testament nomme << le Prince de ce monde >> ou « le dieu de ce siècle ». La liberté humaine, cette liberté dont on nous rebat les oreilles, est assez puissante, quand elle s'allie à la liberté démoniaque, pour tenir Dieu en échec. Un exemple illustre: la crucifixion. >>

    Évidemment, les deux derniers arguments ne l'auraient pas convaincu, puisqu'ils supposent l'existence de ces personnalités hors de la chair auxquelles il refusait de croire, mais le premier avait de quoi alimenter sa réflexion le maître de la Terre, ce n'est pas Dieu, c'est l'homme.

    M. Jonzac était de plus un athée militant, comme s'il avait voulu convaincre les autres, afin de mieux se persuader lui-même. À force d'arguties et d'exemples, il avait réussi à ébranler sérieusement la foi de sa femme et à la détourner de toute pratique religieuse.

    La mort vint à passer. Dans sa demière minute, le prophète du néant se redressa avec vigueur, s'assit sur son lit et s'écria, le visage illuminé:
    << Comme c'est beau, ce que je vois ! Comme c'est beau ! >>

    Il retomba, C'était fini.

    Faut-il comprendre que celui qui, toute sa vie, avait spiritualisé la matière et matérialisé l'esprit ait été immédiatement parachuté au septièrne ciel? Non, sans doute, mais il a eu in extremis une révélation. On lui a montré la splendeur du but. Avant le jugement, on lui a fait entrevoir le bonheur. C'est à lui maintenant de travailler à l'atteindre: le monde des esprits est fait pour cela.

    La porte étroite de l'agonie s'était ouverte sur la lumière.
    Et Mme Jonzac retrouva la foi.

    « Les morts qui ont donné signes de vie DE Jean PrieurEntrevue avec France Gauthier (Auteure & conférencière) »
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